mercredi 3 juillet 2013

CORRECTION CHIRURGICALE DES CICATRICES D'ACNE




Introduction :




Le relèvement des cicatrices d'acné est un acte préparatoire à l'acte final de leur correction par dermabrasion. Cet acte de relèvement a été imaginé grâce à l'existence du punch à biopsie et inspiré par ce dernier. Sans punch, la technique du relèvement de cicatrices n'aurait pas vu le jour. Le principe du relèvement consiste à inciser le tour de la cicatrice avec un punch à biopsie comme si l'on voulait en réaliser l'exérèse, puis à attirer cette cicatrice vers la surface de la peau voisine.


Cependant, avant que le relèvement n'entre en pratique courante, seule la dermabrasion était utilisée pour tenter d'améliorer les états cicatriciels postacnéiques. Mais les résultats esthétiques étaient souvent décevants. Dans la majorité des cas, une dermabrasion (mais aussi une laser-abrasion ou un peeling profond), effectuée isolément, se révèle inefficace, dès que la profondeur des cicatrices dépasse un certain seuil. En effet, si la profondeur des cicatrices n'est pas trop grande, la dermabrasion peut apporter un certain degré d'amélioration en diminuant le creux ou parfois en effaçant complètement des cicatrices très superficielles. Mais, dans la plupart des cas, les cicatrices en creux du visage après acné (et également après d'autres causes) sont trop profondes et l'abrasion, même répétée à plusieurs mois d'intervalle, apporte des résultats assez pauvres, car il y a une limite de profondeur que l'on ne doit pas dépasser.

Sur des cicatrices profondes d'acné, ne jamais faire de dermabrasion avant d'avoir relevé les cicatrices.



Déroulement schématique : 



Après avoir effectué l'incision circulaire à l'aide du punch, le fragment de tissu cutané ainsi partiellement détaché ne tient plus que par son pédicule profond. Si l'incision a atteint le tissu cellulaire sous-cutané, ce qui est une condition indispensable, le pédicule est très lâche et il suffit de saisir le fragment avec un crochet de chirurgie plastique ou une pince à griffes fines et de le tirer vers l'extérieur. Il se laisse facilement mobiliser et, dans la plupart des cas, sans tendance à reprendre sa position initiale. On le place en sorte que le plan cutané du fragment se situe au niveau ou un peu au-dessus du niveau de la peau environnante. Le maintien dans sa nouvelle position est facilité par le saignement sous-jacent suivi de la coagulation. Aucune suture n'est nécessaire pour les cicatrices de petite taille. Un petit pansement gras est appliqué et maintenu sans changement pendant un délai qui est habituellement de 4 jours, mais qui peut être prolongé sans inconvénients. 

Au quatrième jour, on enlève le pansement afin de constater l'évolution normale. Souvent, à ce stade, le fragment relevé a une teinte violacée, témoin de la diminution de circulation causée par l'incision circulaire. Ceci est encore plus marqué lorsque le pédicule du fragment a été sectionné lors d'incisions sous-jacentes en vue de faciliter le relèvement (cf infra) ou encore en cas de greffe. Des caillots occupent la ligne d'incision circulaire. Souvent, alors qu'habituellement la peau du fond de la cicatrice perd son grain, ayant un aspect lisse, atrophique avec disparition des pores de l'épiderme, on constate que l'épiderme a récupéré son grain naturel, comme si l'incision avait libéré des adhérences cicatricielles. Ceci est un phénomène fréquemment observé lors du relèvement de la cicatrice incisée, et en revanche inexistant lorsque cette dernière est remplacée par une greffe, en raison de la différence du grain de peau de la zone donneuse, notamment la région rétroauriculaire. C'est pourquoi, chaque fois que la situation clinique le permet, on préfère le relèvement à la greffe. 

Au huitième jour, les caillots sont tombés. La trace de l'incision circulaire reste encore bien visible. Le fragment est parfois en surélévation. Il faut déjà signaler que souvent, lors de relèvements, dans les premières semaines le fragment déborde le niveau de la peau voisine. On décrit plus loin comment niveler ce débord avant de procéder à la dermabrasion finale, lorsque le surplomb dépasse 0,5 mm, mais il ne faut jamais se presser pour réaliser ce nivellement car très souvent, après 1 ou 2 mois, le relief s'est spontanément affaissé, et si l'on avait corrigé le débord prématurément, on se retrouverait devant un creux à relever. 



Différents types de cicatrices du visage :



Seuls certains types de cicatrices d'acné peuvent bénéficier de ce mode d'intervention. C'est pourquoi il importe de décrire au préalable les différents aspects cliniques des cicatrices d'acné. 
Il peut s'agir de cicatrices en relief, hypertrophiques ou chéloïdes ; il existe également des cicatrices planes, achromiques ou hyperchromiques, mais les cicatrices le plus fréquemment rencontrées sont les cicatrices en creux, les cicatrices déprimées. Si leur cause la plus fréquente est l'acné excoriée, il faut noter que les procédés de correction chirurgicale dont la description va suivre s'appliquent à toutes les cicatrices déprimées, quelles que soient leurs causes. Les causes moins fréquemment rencontrées sont l'herpès, la varicelle, les folliculites nécrosantes autres que l'acné (tuberculides papulonécrotiques, etc), les cicatrices postopératoires, pathomimiques etc. 
Les cicatrices déprimées d'acné, elles-mêmes, peuvent revêtir également divers aspects, selon la forme du contour de la cicatrice, de ses bords et de son fond.



Selon le contour: 
Le contour comporte le plus souvent une certaine irrégularité, contrairement aux cicatrices de varicelle qui sont toujours arrondies, comme tracées au compas, ayant toujours un bord abrupt et un fond plat et bien régulier. Ces dernières sont celles qui répondent le mieux à la technique des relèvements et sont les plus faciles à opérer du fait de leur régularité géométrique. À l'inverse, du fait de l'irrégularité et de la multiplicité de leurs formes, la correction des cicatrices d'acné est beaucoup plus délicate et, par conséquent, l'étude de ces formes est très importante car elle va guider le geste chirurgical à accomplir. 



Cicatrice incluse dans un seul cercle :

Dans l'acné excoriée, le contour des bords est, le plus souvent, polygonal, irrégulier. Les cicatrices sont parfois ovalaires, allongées, plus rarement larges, à contour polycyclique. Lorsqu'elles sont très irrégulières, mais de petite taille (inférieure à 5 mm), elles sont englobées dans un seul cercle incluant toutes les irrégularités, ce qui veut dire que la mesure à retenir pour le choix du punch est le plus grand écart entre deux irrégularités diamétralement opposées. 

En présence d'une cicatrice légèrement ovale, après avoir dessiné le contour ovale à inciser, le pouce et l'index de la main non active tendent la peau dans le petit axe, arrondissant l'ovale en sorte que le punch coupe sur la ligne dessinée. Après section, quand les doigts relâchent la peau, on constate que l'incision est ovale et on relève le fragment en le laissant dans son axe. 



Cicatrice divisible en plusieurs cercles :

Lorsqu'une cicatrice est très allongée, on la divise en plusieurs cercles alignés que l'on relève en deux ou trois temps. Lorsque les cicatrices sont très larges, à contour polycyclique, on cherche à dessiner plusieurs cercles qui doivent couvrir entièrement la surface de la cicatrice, mais qui peuvent se chevaucher car la correction de ces cicatrices est toujours faite en plusieurs étapes. Du fait du contour polycyclique, les cercles de la périphérie doivent s'inscrire partiellement dans les contours de la cicatrice, le reste de la section tombant à l'intérieur. Les détails de cette division sont expliqués plus loin. 



Selon les bords et le fond :

L'étude du fond de la cicatrice et de ses bords a aussi son importance car, dans certains cas, le relèvement n'est pas réalisable immédiatement. Il doit être précédé d'actes préparatoires. 



Fond en pointe :

Le fond de la cicatrice peut être en pointe ; c'est souvent le cas des orifices élargis de canaux de glandes sébacées. Dans ce cas, les bords descendent à pic vers le fond. Avant d'entreprendre la correction chirurgicale d'une telle cicatrice, il est important d'en effectuer le sondage pour vérifier qu'il s'agit bien d'un trou borgne. Pour cela, on utilise une petite sonde à bout mousse, sonde olivaire, et on cherche à suivre le trajet en profondeur. On enfonce d'abord la sonde verticalement, puis on promène le bout olivaire sur le pourtour pour bien explorer les bords et vérifier l'absence d'un prolongement de la cicatrice au-delà de ses bords apparents (bords décollés épidermisés). Fréquemment, dans les cicatrices consécutives à des acnés graves, ayant évolué avant la disponibilité des traitements par l'isotrétinoïne, on peut trouver de tels prolongements qui rendraient le relèvement problématique s'il était effectué sans un geste préalable (cf infra). Dans certains cas, même, ces prolongements créent de véritables tunnels. En effet, dans les cicatrices multiples d'acné, on se trouve parfois en présence d'une communication avec une cicatrice voisine par un tunnel horizontal(fig 1).

Ce type de cicatrice nécessite une approche chirurgicale très particulière (cf infra). Ignorer une telle situation expose à des erreurs et des complications qu'il importe d'éviter. En effet, le relèvement de deux cicatrices voisines communiquant par un tunnel en profondeur crée de toutes pièces une cavité pseudokystique fermée qui va être à l'origine d'une petite collection suppurée, elle-même susceptible de créer une nouvelle cicatrice.



Bords abrupts et fond plat :

Le fond de la cicatrice peut être plan, se rattachant à la peau qui l'entoure par un bord abrupt en pente presque verticale. Dans ce cas, le plan du fond de la cicatrice se raccorde avec la partie profonde du bord de la berge, suivant un angle proche de 90°, légèrement supérieur (angle obtus). De même, la partie superficielle de la berge se raccorde avec le plan de la peau voisine suivant un angle à peu près identique, conformément à la règle géométrique de l'intersection de deux parallèles par une droite (fig 2).


Ce type de cicatrice est celui qui répond le mieux à la technique de relèvement. On la qualifie de cicatrice à bord abrupt et à fond plat. Si cet angle est inférieur à 90° (la berge se raccordant avec le fond suivant un angle aigu), on est en présence d'une cicatrice à bord décollé. À l'inverse, si l'angle est très obtus, on est en présence d'une cicatrice à bord en pente douce. Ces deux cas sont envisagés plus loin. 

La véritable dimension de la cicatrice, le diamètre qui sert au choix de l'instrument, se mesure à partir du point d'intersection superficiel de la berge avec la peau, et non au point d'intersection du bord profond avec le fond de la cicatrice. Ce point d'intersection superficiel est souvent une petite courbe et la mesure de la cicatrice doit l'inclure entièrement (fig 3).




Dans le cas où la cicatrice est un cercle irrégulier présentant des bords festonnés, la mesure à retenir est le plus grand écart entre deux irrégularités diamétralement opposées. 



Fond courbe :

Le fond de la cicatrice en creux est souvent une courbe à grand rayon qui ne présente aucune bordure nette mais se raccorde en pente douce avec la peau voisine, l'angle entre le plan normal de la peau et la pente du creux dépassant 150°. Ces cicatrices sont souvent assez vastes, multiples, créant un aspect d'ondulations juxtaposées. Ces types de cicatrice ne sont pas une bonne indication pour la technique des relèvements, mais elles peuvent être améliorées par les procédés de comblement en se rappelant que, à la différence des relèvements dont le résultat est définitif, les modifications de relief obtenues par les produits de comblement sont temporaires et que l'acte doit être répété après quelques mois.



Instruments : 

Le punch est l'instrument incontournable de la technique de relèvement. C'est lui qui a été l'inspirateur de cette technique. 



Pour la petite histoire :

On attribue la paternité du punch à un dermatologue américain, Edward L Keyes. En l'année 1879, ce dermatologue fut amené à soigner un homme blessé au visage par l'explosion d'une charge de feu d'artifice ayant provoqué des centaines de points de tatouages par poudre, de différentes dimensions. Il imagina d'enlever ces points à l'aide d'emporte-pièces de diamètres variés qu'il fit construire spécialement pour cet usage. Le résultat postopératoire fut excellent. Ensuite, un tel instrument fut utilisé pour des prélèvements de peau pour diagnostic. Le punch à biopsie était né.



Punch :

On ne saurait imaginer une découpe circulaire au bistouri ordinaire. La section serait irrégulière, l'angle d'attaque varierait d'un point à l'autre autour de 90°. Le punch procure une découpe circulaire parfaite, avec un angle d'attaque constant de 90°. Le punch, bistouri circulaire, est un instrument comparable à l'emporte-pièce des cordonniers. Il est constitué d'un cylindre creux. À la différence des emporte-pièces, la paroi du cylindre est très étroite, aussi fine que la lame jetable d'un bistouri. La circonférence d'une base est affûtée par un biseau habituellement situé sur sa face externe. De nouveaux types de punch sont affûtés par un double biseau, externe et interne, ce qui leur confère une qualité de coupe exceptionnelle. Cette particularité a été développée au départ dans l'utilisation des punchs pour les greffes de cheveux. Cependant, après quelques utilisations ou après une manipulation incorrecte, le fil s'émousse et il est nécessaire de procéder à un affûtage régulier. C'est un acte que l'on peut réaliser soi-même. L'entretien, le nettoyage et l'affûtage des punchs ne sont pas décrits ici. Ils ont été précisés en détail pour leur utilisation dans les greffes de cheveux . L'autre base du cylindre constituant le punch est fermée et prolongée dans son axe par un manche. Tantôt il s'agit d'un manche assez gros, présentant des striures qui permettent une manipulation digitale directe, tantôt il s'agit d'une tige étroite d'une dimension standard prévue pour s'adapter à un moteur électrique. Dans cette forme avec tige étroite, lorsque l'on n'utilise pas le moteur, il faut l'adapter à un manche analogue à certains petits tournevis d'horloger. Le corps du cylindre présente un trou sur sa paroi, permettant l'échappement de l'air lors du mouvement d'enfoncement. En raison de la variabilité des tailles de cicatrices, afin d'adapter la découpe circulaire à la dimension de la cicatrice à corriger, il est nécessaire de disposer d'une gamme complète de dimensions allant de 2 à 14 mm de diamètre. Entre 2 et 4 mm, la progression de taille se fait par 0,25 mm, ensuite par 0,5 mm puis par 1 mm jusqu'à 8 mm. Enfin, on trouve les dimensions suivantes : 10, 12, 14 mm. 

Pour les très grands diamètres, le couple nécessaire à la rotation et à l'enfoncement est élevé et l'effort de la main risque de faire dévier l'axe, pouvant créer un enfoncement hélicoïdal. C'est dans ces cas que l'on peut utiliser le moteur dont on ne lance la rotation (lente) qu'après avoir posé le fil du punch sur la peau. On contrôle et maîtrise la descente en profondeur par la main passive (main gauche du droitier), tandis que la main active enfonce lentement le punch dans l'axe perpendiculaire au plan de la peau. Il faut également signaler d'emblée que, pour ces grands diamètres, le relèvement est obligatoirement assorti d'une suture soigneuse sur toute la circonférence de la découpe. 
On dispose également de punchs à usage unique montés sur manche en plastique. Leur qualité de coupe, quoique inférieure aux punchs « tout métal », est correcte.



Autres instruments :

Les autres instruments utilisés pour les relèvements sont : 

un crochet chirurgical type crochet de Gillies ; 

deux petites pinces à griffes fines ; 

un manche de bistouri et une lame 11 ; 
une petite sonde à bout olivaire ; 
un porte-aiguille et du matériel de suture très fin. 



Correction chirurgicale des cicatrices d'acné :

Différentes méthodes :


Indépendamment de la technique de relèvement, pour corriger une cicatrice, l'acte le plus couramment utilisé est l'excision de la cicatrice dans un fuseau, suivie d'une suture bord à bord, en général en deux plans : un plan profond utilisant un matériel lentement résorbable en s'efforçant d'amener les deux bords de la plaie en contact l'un de l'autre avant même que la suture superficielle n'ait été effectuée. Cette dernière est alors réalisée sans aucune traction, soit par points simples, soit par un surjet. Dans ce dernier cas, le meilleur résultat esthétique est obtenu en faisant un surjet intradermique qui ne laisse aucune trace sur la peau. Certes, une cicatrice d'acné isolée, de petite dimension, siégeant sur une joue ou au front peut être enlevée de cette façon, mais le plus souvent soit du fait de son siège, notamment sur toute la surface nasale, soit du fait du nombre important et de la proximité réciproque d'autres cicatrices, l'excision suture n'est pas applicable et seuls le relèvement ou l'excision greffe sont utilisables. 



Technique de relèvement :

Pour confirmer le bon choix du punch, il faut, avant toute incision, le poser bien centré sur le contour dessiné de la cicatrice et exercer une légère pression verticale sans rotation. Le fil marque ainsi une discrète empreinte sur la peau, et l'on peut alors vérifier si le diamètre choisi correspond exactement au dessin. Ensuite, on effectue l'anesthésie locale précédant le relèvement. 



Anesthésie locale :

Deux approches sont possibles.

Dans une première approche, pour éviter de déformer la cicatrice par une infiltration sous-jacente, on réalise de minimes injections tout autour d'une cicatrice à relever. Les seringues et aiguilles de dentiste, utilisant des carpules d'anesthésiques, sont particulièrement utiles pour cela ; en effet, du fait de la longueur de la carpule et de son étroitesse, des pressions de 1 ou 2 mm sur le piston envoient une quantité minime à la fois. Faisant quelques points d'injection autour de la cicatrice, celle-ci n'est pas déformée, son pourtour est anesthésié, et l'on peut adapter le punch qui convient pour l'incision et le relèvement. 
Dans une autre approche, avant toute injection, après avoir nettoyé et désinfecté la peau, après avoir dessiné le cercle à inciser, on peut infiltrer la cicatrice dans le tissu immédiatement sous-jacent, même si cette infiltration déforme la cicatrice en soulevant un peu son fond, car le trait étant dessiné, il reste simplement l'incision à effectuer. La pression créée par l'infiltration va faciliter le soulèvement de la cicatrice. Lorsque l'on projette de relever plusieurs cicatrices dans un périmètre restreint, on dessine toutes les cicatrices, puis on procède à une anesthésie locorégionale ou tronculaire, on réalise toutes les incisions et on dispose un gros pansement provisoire pour absorber le saignement souvent abondant. Après une dizaine de minutes, la coagulation s'étant produite, on enlève le pansement et on procède au relèvement proprement dit. 



Incision circulaire :

L'erreur courante du débutant consiste dans le choix d'un punch trop petit, celui qui s'adapte exactement sur le plancher de la cicatrice. Il est bien évident qu'en opérant de la sorte (cf supra) (fig 3),

les berges de la cicatrice échappent au relèvement, restant donc en place, et seul le plancher subit une ascension, le résultat final étant une petite rigole circonscrivant le fond relevé de la cicatrice. Par conséquent, l'ensemble de la cicatrice, berges comprises, doit être inclus dans l'incision (fig 4A, B, C).





Les cicatrices rondes, à berges abruptes, à fond plat, sont les plus aptes à la correction par relèvement. L'incision doit englober l'ensemble de la cicatrice, incluant les berges en totalité, même si elle les dépasse légèrement. 

Le punch est posé bien à plat sur la peau, le manche étant perpendiculaire au plan cutané, et l'incision circulaire est réalisée en combinant l'enfoncement et la rotation du punch entre le pouce et l'index. Pendant la manipulation du punch, celui-ci est animé d'une double composante cinétique : progression linéaire vers la profondeur et rotation sur son axe. Il est important de rester constamment dans l'axe pendant la progression, afin que la section soit parfaitement cylindrique. Il importe également de faire tourner suffisamment le punch pour que la découpe puisse se faire sans écraser les tissus. En effet, en cas d'écrasement de la peau pendant la découpe, soit du fait d'un enfoncement brusque sans rotation, soit du fait de l'utilisation d'un punch mal affûté, le fragment incisé, au lieu d'avoir une forme régulièrement cylindrique, a une forme conique, le pédicule se rétrécissant vers la profondeur. Ceci est un inconvénient pour la bonne tenue du fragment après relèvement, car la cicatrice relevée ne tient pas bien dans son site et peut se déplacer après pose du pansement. L'incision peut donc être effectuée avec le punch seul (punch à manche strié pour les punchs de petite dimension), avec le punch monté sur manche pour les dimensions moyennes et enfin avec le moteur pour les très gros punchs.



Profondeur d'incision :

La profondeur d'enfoncement doit être suffisante, devant atteindre le tissu cellulaire sous-cutané. Si l'incision est timide et se termine dans le derme réticulaire, la peau se mobilise difficilement et reprend sa position initiale dès que l'on a cessé la traction. Cependant, il faut avoir toujours présent à l'esprit l'éventualité d'une blessure d'organe sous-jacent : canal de Sténon, tronc nerveux, axe vasculaire... De même, en cas de cicatrice de la paroi nasale, la prudence exige de ne pas découper trop profondément, au risque de perforer cette paroi. Par conséquent, si une cicatrice est située dans une zone à risque, l'incision circulaire doit être moins profonde, n'atteignant que le derme profond ou la couche hypodermique la plus superficielle. Mais, dans ce cas, le fond de la cicatrice ne se laisse pas aisément attirer vers la surface. Il faut alors faciliter sa mobilisation en effectuant des incisions sous-jacentes. Pour cela, on soulève le fragment à l'aide d'une pince à griffes fines et on réalise de fines incisions au niveau de la tranche de section cylindrique du fragment dans le derme profond, soit avec un bistouri lame 11, soit avec de petits ciseaux fins. On crée ainsi quelques entailles tout autour du pédicule, ce qui a pour effet de l'allonger et de faciliter l'ascension du plan cutané. Il peut arriver que, lors de ces manoeuvres de découpe, ce pédicule soit complètement sectionné. On replace alors le fragment comme si on réalisait une greffe libre. Mais habituellement, il suffit de quelques entailles pour allonger suffisamment le pédicule. En dehors des zones à risque, notamment au menton, en dépit d'une profondeur suffisante de découpe par le punch jusqu'au tissu cellulograisseux sous-cutané, après avoir tiré sur le fragment et l'avoir correctement placé, il arrive que ce dernier reprenne lentement sa position initiale. Dans cette éventualité, il faut également effectuer des incisions complémentaires. Celles-ci sont faites en profondeur, dans le tissu cellulograisseux sous-cutané, sectionnant des travées conjonctivoélastiques et permettant une meilleure ascension de la cicatrice. 



Relèvement, modelage :

Une fois ces manoeuvres réalisées, le fragment est bien mobile ; on l'attire vers le haut avec un crochet ou une pince à griffes ; on l'amène ainsi au niveau de la peau environnante ou très légèrement au-dessus de ce niveau. On attend quelques minutes avant de placer le pansement, pour bien vérifier la stabilité de sa nouvelle position. 

Il apparaît évident que, du fait de la présence des berges abruptes incluses dans le fragment incisé, la surface à relever a une forme de cupule. Parfois, à la suite de l'incision circulaire, cette surface s'aplatit spontanément. Dans d'autres cas, il est nécessaire de forcer cet aplatissement, à l'aide de deux pinces à griffes qui vont permettre de le façonner jusqu'à ce qu'il prenne la forme plate. On le place ensuite au bon niveau. D'ailleurs, le gain de surface provoqué par cet aplatissement compense la perte de surface due à l'élasticité des tissus. On sait en effet que lors d'une section circulaire de la peau, la portion centrale se rétrécit et la zone périphérique, au contraire, s'élargit. Mais souvent, la cicatrice a une certaine rigidité et conserve sa surface en cupule en dépit de l'incision circulaire ou des manipulations entre les pinces à griffes. Après relèvement et cicatrisation, le fond relevé de la cicatrice est à niveau, mais le pourtour forme un petit cercle en relief. Ce dernier n'est jamais important et est facilement écrêté par la dermabrasion finale. 



Excision, pansement, fixation :

Dans certains cas, lorsque la peau du fond de la cicatrice à relever est de mauvaise qualité, ou encore lorsqu'il s'agit d'une cicatrice à pic, comme on l'a déjà mentionné, le fragment doit être complètement enlevé. Pour les cicatrices inférieures à 2,5 mm, on peut laisser le trou libre. L'épidermisation spontanée se fait au bon niveau. Au-delà de 2,5 mm, le fragment excisé est remplacé par une greffe libre prélevée à l'aide d'un punch légèrement plus grand que celui qui a servi à la section de la cicatrice (cf infra). On place ensuite un gros pansement compressif : compresse stérile doublée d'une couche épaisse de coton hydrophile. Ce pansement va absorber le saignement jusqu'à l'arrêt de l'hémorragie, ce qui nécessite parfois une attente de plusieurs minutes. Ensuite, on procède au relèvement de la cicatrice. Aucune suture n'est nécessaire pour les petites tailles inférieures à 7 ou 8 mm. La seule coagulation fixe le relèvement dans la position donnée, à condition que le fragment soit bien découpé et se soit mobilisé facilement. En revanche, à partir de 8 mm et au-delà, la différence de surface entre la portion centrale séparée par l'incision circulaire et le creux réalisé par l'incision est grande, et le fragment une fois relevé ne se maintient pas bien spontanément dans la position voulue, l'affrontement n'étant pas complet sur toute la circonférence, d'autant qu'il a une fréquente tendance à s'enrouler sur lui-même. Il est alors indispensable de procéder à une suture en multiples points réalisant un bord à bord circulaire précis. Une fois le relèvement bien stabilisé, on place un pansement gras (Tulle gras Lumière®, Biogaze®) et une compresse stérile fixée par un micropore. Ce pansement est maintenu 4 à 5 jours, prescrivant au patient de ne pas le changer, pour éviter de déplacer le fragment. Passé ce délai, le pansement est enlevé. Chaque cicatrice relevée présente un fragment de sang coagulé qu'on se garde de nettoyer. On attend sa chute spontanée.



Cicatrices polycycliques, proéminence, nivellement :

Dans certains cas, une cicatrice en creux peut être trop vaste et surtout sa forme n'est pas arrondie mais, si on observe bien son contour, on voit qu'il est formé d'une succession de segments de circonférences lui conférant une forme polycyclique. Dans ce cas, on va diviser la cicatrice en cercles et on procède au relèvement par étapes. 

Dans un premier temps, on dessine l'ensemble des cercles qui couvriront la cicatrice, chaque cercle devant s'inscrire dans un segment du contour ; on incise l'un des cercles (ou plusieurs cercles suffisamment distants les uns des autres) en plaçant le punch sur une portion de la courbe du pourtour de la cicatrice, sans oublier d'englober la berge dans la portion de cercle concernée, le reste de l'incision tombant en plein dans la cicatrice. On laisse passer un délai suffisant, non seulement pour que la cicatrisation soit terminée, mais pour que ce ou ces premiers relèvements soient solidement soudés au tissu voisin. Le délai de sécurité minimal est de 3 semaines(fig 5A).
On procède alors à la deuxième étape du relèvement, choisissant un cercle adjacent, le punch devant s'inscrire dans une autre portion du pourtour polycyclique, et mordant en général sur le relèvement précédent. On procède ainsi de suite jusqu'à ce que le dernier creux puisse s'inscrire dans un punch (fig 5B, C).


En général, on obtient alors une cicatrice assez irrégulière, un peu gaufrée, présentant forcément des irrégularités. Les petits reliefs persistants peuvent être régularisés par des pointes d'électrodessication, l'acte final devant être la dermabrasion. 

Il peut arriver qu'un relèvement ait été trop important, dépassant franchement le niveau de la peau environnante, réalisant parfois un petit dôme. Il faut alors niveler la proéminence en réalisant une découpe tangentielle avec un bistouri lame 11. Ce nivellement peut également être effectué par électrodessication. Cependant, il faut se rappeler que cette correction de relief ne doit pas être réalisée trop précocement car souvent le surplomb se résout spontanément dans les 1 ou 2 mois qui suivent le relèvement. La prudence est donc d'attendre ce délai avant de niveler au bistouri la proéminence. 



Cicatrices à bords décollés. Tunnel 

Si, oubliant de sonder le pourtour d'une cicatrice à bords décollés, on relève cette cicatrice suivant la technique qui vient d'être décrite, on va créer après cicatrisation une cavité fermée, susceptible de complications ultérieures (petit kyste pouvant s'infecter et créer une nouvelle cicatrice). La même éventualité se produit en cas de communication en tunnel entre deux cicatrices. On ne peut donc relever ces cicatrices sans procéder à des actions préliminaires. Lorsqu'il s'agit de bords décollés simples, il faut effondrer toute la zone de décollement. Ceci peut être effectué en découpant la portion décollée jusqu'au fond du cul-de-sac. Cette action agrandit la cicatrice et transforme l'angle aigu de sa berge en un angle égal ou légèrement supérieur à 90°, ce qui la rend apte au relèvement. Lorsqu'il s'agit d'un tunnel reliant deux cicatrices, la situation se présente comme un pont de peau passant au-dessus du tunnel et séparant les deux cicatrices. Il faut faire « sauter le pont ». Pour cela, on passe la lame 11 d'un bistouri sous le tunnel et on coupe l'un des côtés du pont. Ensuite, saisissant le pont à moitié détaché, avec une pince à griffes, on le tend et on le coupe à son autre extrémité. Dans les deux cas, après excision de bords décollés sur une cicatrice isolée ou après excision d'un pont surplombant un tunnel entre deux cicatrices, on place un pansement gras et les surfaces cruentées s'épidermisent en quelques jours. Il faut bien être conscient que ces gestes transforment des petites cicatrices en cicatrices plus grandes, dont la forme n'est plus toujours arrondie et qui doivent ensuite subir la procédure de relèvements multiples échelonnés (cf supra). Mais il faut savoir que c'est la seule et unique façon d'aborder ces cicatrices à bords décollés ou communicantes. 

Dans les cicatrices à bords décollés ou communicantes, quelque temps avant la procédure de relèvement, il faut exciser les partis décollées ou faire sauter le pont surplombant la communication. 



Microgreffe :

Indication :

La technique des relèvements est sûrement plus fréquemment utilisée que la technique par excision suivie de greffe. Comme préparatifs de la dermabrasion, ces deux méthodes ont leurs indications respectives : relèvements pour les cicatrices à fond plat, greffes pour les cicatrices en pic. 

Cette dernière technique est parfois préférée, quel que soit le type de cicatrices, au motif que le fragment incisé pour relèvement se rétracte et perd une fraction de sa surface, laissant un espace entre lui et la peau voisine. Quoiqu'il en soit, soit on corrige une cicatrice en pic et on la remplace par une greffe sans hésiter sur le choix de la méthode, soit on corrige une cicatrice à fond plat et on commence par choisir le relèvement pour la corriger. Une fois l'incision circulaire réalisée, on procède à la manipulation visant à aplatir le fragment à relever et à lui donner une superficie qui s'adapte avec la peau voisine (cf supra). Si ce but ne peut être atteint du fait de la rigidité, du manque de souplesse du fragment incisé, et si celui-ci s'est trop rétracté par rapport à son site (qui lui s'est élargi), il est toujours temps de changer de stratégie, d'enlever la cicatrice et de prélever un fragment de peau pour greffe.



Technique :

L'intervention commence exactement comme pour les relèvements : incision circulaire de la cicatrice. Pour cette incision, toutes les règles décrites lors du relèvement restent valables : choix du punch englobant complètement la cicatrice ou la dépassant légèrement, incision circulaire jusqu'au tissu cellulaire sous-cutané. Cette notion de profondeur revêt toute son importance lorsque l'on est en présence d'une cicatrice en pic profond, car il faut être sûr d'exciser toute la cicatrice et de ne pas laisser dans la profondeur un fragment d'épiderme ou le fond d'un petit kyste sébacé. Il faut alors prélever un greffon d'une hauteur suffisante afin qu'il s'adapte bien à la profondeur du trou restant. En revanche, si l'on est en présence d'une cicatrice à fond plat et si l'on a délibérément opté pour la greffe du fait de la mauvaise qualité du fond de la cicatrice à corriger, la profondeur est moindre car on peut terminer la séparation du fragment par dissection à l'aide d'une pince à griffes fines et d'un ciseau fin ou d'un bistouri lame 11. Cette dissection n'enlève que l'épiderme et le derme papillaire. Il reste, dans le fond du trou ainsi créé, une tranche de derme fibrillaire qui constitue une solide assise sur laquelle vient s'appliquer le greffon prélevé dont on a soigneusement ajusté l'épaisseur aux ciseaux afin qu'il vienne parfaitement s'adapter au trou à combler. 

La région rétroauriculaire est habituellement choisie comme zone donneuse, surtout quand l'excision est de faible profondeur. En revanche, lorsque la cicatrice excisée est très profonde (cicatrice en pic), il est nécessaire de prélever une peau plus épaisse, notamment la peau sous-mentonnière. 



Dimension du greffon :

Il ne faut jamais oublier que, lors d'une incision au punch, le fragment central se rétracte tandis que le cercle extérieur s'élargit. Par conséquent, si l'on prélevait un greffon avec le punch qui a servi à la première découpe, ce greffon n'occuperait que partiellement la perte de substance et le résultat esthétique serait de mauvaise qualité car entre le greffon et la peau voisine subsisterait un espace qui cicatriserait en formant une petite rigole circulaire. Par conséquent, il faut toujours prélever un greffon de dimension supérieure. La question est de savoir la cote supérieure à utiliser en fonction de la taille de la cicatrice excisée. 

Dans les petits diamètres, c'est-à-dire de 3 à 4 mm, une correction de 0,5 à 1 mm suffit, c'est-à-dire que par exemple, pour une cicatrice incisée au diamètre 3, on prélève un fragment au diamètre 3,5 à 4 mm. Dans les diamètres supérieurs, à partir de 5 mm, la correction est de 1 à 2 mm. Pour un diamètre de 6 mm, par exemple, on prélève un greffon de 7 à 8 mm. Ces données ne sont pas précises car l'élasticité de la peau varie d'un sujet à l'autre et d'une région anatomique à l'autre. 

C'est pourquoi on peut toujours effectuer la mesure suivante, après avoir enlevé la cicatrice. À l'aide des punchs de diamètres supérieurs, on peut jauger la perte de substance. Le punch qui s'adapte exactement dans le creux à combler est pris comme référence. On prend un punch de 0,5 à 1 mm de plus que ce dernier, sachant qu'il y a une rétraction du greffon après incision. 

Il a été décrit au début de cet article l'incision circulaire d'une cicatrice faiblement ovale, en arrondissant l'ovale par une tension de la peau entre deux doigts agissant dans le petit axe de l'ovale. De la même façon, si une telle cicatrice doit être greffée, indépendamment de la correction de dimension (diamètre du punch), on réalise une tension de la peau donneuse pour obtenir un greffon de forme ovale. Afin de faciliter la fermeture, cette tension est perpendiculaire aux lignes de l'endroit prélevé. La ligne de suture s'inscrit dans cette ligne. Bien entendu, on soigne tout particulièrement la suture circulaire du greffon dans le creux à combler.



Pansement de la zone greffée:

Pour les grandes dimensions de greffe, c'est-à-dire au-delà de 6 cm, le greffon a tendance à se recroqueviller, rendant indispensable une suture. Celle-ci est exécutée en multiples points espacés de 2 à 3 mm, ce qui équivaut, pour une greffe de 10 mm par exemple, à sept ou huit points. Comme il s'agit d'une suture sans aucune tension, ces points peuvent être enlevés dès le troisième jour.

En cas de greffe, ou lorsque la cicatrice a été détachée à la suite d'incisions sous-jacentes en vue d'allonger le pédicule, il existe un risque de déplacement ou d'arrachement du fragment lors du premier changement de pansement. Pour les petites tailles de cicatrices (greffon inférieur à 6 mm), on pulvérise un vernis chirurgical (type Ercéfilm®) sur la greffe et sur la peau voisine, et après avoir déplié complètement une compresse de gaze stérile, la réduisant à une seule couche, on l'applique bien tendue entre les deux mains contre la surface pulvérisée et on la maintient immobile jusqu'à dessiccation du vernis. Par transparence, on peut contrôler, à travers la maille de la gaze, que le greffon ne s'est pas déplacé. On décolle ensuite la gaze jusqu'à une distance de 1 cm environ autour de la greffe, puis on découpe cette partie décollée. Il reste un rond de gaze restant adhérente au greffon et à la peau alentour, et maintenant de façon très stable le greffon. Par dessus, on place un pansement gras que l'on peut changer au quatrième jour, sans toucher à la gaze adhérente. Celle-ci permet d'éviter l'arrachement du greffon lors du changement de pansement.



Fermeture de la zone donneuse :

Lorsque l'on prélève des greffons au diamètre de 4 mm et au-delà, la zone donneuse est suturée par un ou deux points simples. En revanche, pour les petites tailles, la zone donneuse est abandonnée à une cicatrisation par seconde intention. 

Lorsque toutes les cicatrices ont été corrigées par relèvement et éventuellement par greffe, on programme la dermabrasion, en se rappelant qu'elle doit suivre d'au moins 1 mois le dernier relèvement.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire