vendredi 28 juin 2013

BRULURE




Généralités

Dans les pays industrialisés, trois individus sur 1 000 sont, chaque année, victimes de brûlures. En France, ceci correspond à 150 000 personnes . Parmi elles, de 7 000 à 10 000 sont hospitalisées dans un hôpital général, de 3 000 à 3 500 le sont dans un des 19 centres spécialisés répartis dans l'Hexagone, représentant une capacité de 200 lits d'inégal équipement.


C'est dire l'intérêt pour les spécialistes de l'urgence de bien connaître une lésion peu ou pas enseignée lors de leurs études. La brûlure est d'autre part la blessure la plus fréquente des situations de catastrophe ou de guerre ; elle y est souvent associée à d'autres lésions traumatiques. Une seule catastrophe peut, en quelques minutes, saturer les possibilités d'accueil de l'ensemble des centres spécialisés.

La brûlure est définie comme la destruction traumatique de la peau et des tissus sous-jacents par un processus qui est thermique (90 %), électrique (de 5 à 7 %), chimique (de 3 à 5 %), mécanique (dermabrasion) et exceptionnellement radiologique. Soixante à 70 % des accidents surviennent à la maison ; de 20 à 25 % sont en relation avec le travail. Les tentatives de suicide et les accidents de trafic sont des étiologies moins fréquentes, représentant respectivement de 3 à 5 % des admissions. Un brûlé sur trois est âgé de moins de 15 ans.
La brûlure évolue classiquement selon deux phases chronologiques : une phase initiale de quelques jours est dominée par le risque de choc et de détresse respiratoire ; elle laisse place chez le survivant à une phase longue où le malade n'a plus de peau, qui ne cesse qu'à la cicatrisation. C'est la « maladie des écorchés », faite de troubles métaboliques, endocriniens, nutritionnels et immunologiques. Tout le long de cette évolution, le brûlé reste exposé à une infection contre laquelle ses capacités de défense sont amoindries.
Dans cet article, nous nous intéresserons à la phase initiale, celle où le spécialiste des urgences intervient. Après une description physiopathologique de la brûlure, nous suivrons la progression du malade : ramassage et transport préhospitalier, puis admission à l'hôpital où le praticien doit évaluer la brûlure, mettre en route et poursuivre la réanimation, orienter le patient vers la structure la plus appropriée. 




Physiopathologie 
Localement 
Le temps d'exposition nécessaire à la création d'une brûlure thermique décroît de façon exponentielle lorsque la température de la source augmente (15 minutes à 48 °C, 1 seconde à 70 °C, etc.). On décrit une lésion comportant une zone de nécrose centrale dont il faut s'efforcer de limiter l'extension aux dépens d'une zone de souffrance cellulaire dont la viabilité est aléatoire ; autour se trouve une zone d'hyperhémie. 
La profondeur des lésions a fait l'objet d'une classification en degrés basée sur la description histologique .
L'évolution des brûlures du second degré profond (souvent appelées intermédiaires) dépend de l'âge du malade et de la qualité des soins.




Sur le plan régional 
La destruction cellulaire active le système du complément et le facteur XII. Il en découle une réaction inflammatoire suraiguë avec libération des substances vasoactives : histamine, sérotonine, kinines, C3a, C5a, etc., et activation des plaquettes puis des leucocytes qui, à leur tour, libèrent radicaux libres oxygénés, prostaglandines, leucotriènes etplatelet activating factor acéther . Ces cellules se recrutent et s'activent par l'intermédiaire de cytokines ; elles se lient aux cellules endothéliales et les unes aux autres par des protéines et des récepteurs spécifiques. 
La fuite massive de liquides intravasculaires est liée à cette réaction inflammatoire source d'un profond désordre capillaire et d'une modification de la matrice interstitielle qui l'entoure . L'équation de Starling est modifiée dans tous ses composants : il existe une augmentation de la pression hydrostatique capillaire par vasoconstriction artérielle et surtout veineuse ; le coefficient de filtration, qui représente la facilité des échanges liquidiens, et le coefficient de réflectivité, qui représente les échanges protéiques, sont très altérés ; la fuite capillaire est aggravée par une diminution grave de la pression hydrostatique interstitielle. L'ensemble génère une fuite liquidienne et protéique majeure du secteur vasculaire vers le secteur interstitiel où se crée un troisième secteur sous forme d'un oedème. La fuite capillaire est biphasique, constituée d'un premier pic immédiat, lié à la modification de la matrice interstitielle, suivi 1à 2 heures plus tard d'un deuxième pic dû à l'apparition de la modification de perméabilité ; un plateau est atteint vers la douzième heure. L'oedème des brûlures superficielles se constitue plus rapidement et se draine plus vite que l'oedème observé lors des brûlures profondes. En effet, le drainage lymphatique, malgré l'augmentation de débit, est dépassé et ne peut évacuer les liquides interstitiels stockés ; lors des lésions profondes, ces vaisseaux lymphatiques sont plus volontiers détruits ou comprimés. Une partie des fluides est exsudée à travers les lésions et définitivement perdue.

Pendant 6 heures, une hyperperméabilité capillaire se manifeste dans les tissus sains non brûlés. Par la suite, la fuite liquidienne y est en relation avec l'hypoprotidémie et la qualité de la réanimation. 

Une modification du rapport ventilation/perfusion pulmonaire est observée, alors que l'oedème pulmonaire est rare en dehors des lésions d'inhalation. Chez les brûlés les plus graves, il existe une myocardiodépression dont l'origine reste à déterminer : oedème de la fibre myocardique , facteur toxique . La chute des facteurs de coagulation, du fibrinogène et du nombre de plaquettes est en relation partielle avec une coagulopathie de consommation dont les stigmates sont biologiques plus souvent que cliniques. La brûlure grave se traduit par une hémolyse liée avant tout à l'agression thermique des globules rouges. La présence de myoglobine, lorsqu'elle existe, est due à la compression ou à la brûlure musculaire. 



Conséquences


Ceci est lié au développement de la réaction inflammatoire dont témoigne l'élévation de certaines cytokines. La modification des circulations régionales peut aboutir à l'ischémie de certains territoires. L'insuffisance rénale en est la conséquence. La translocation bactérienne colique prouvée chez l'animal n'a pas pu être prouvée chez l'homme . L'action de la brûlure sur l'intestin et l'amplification de la réaction inflammatoire s'expliquent par un phénomène plus complexe de priming des cellules intestinales et de migration de celles-ci et de leurs cytokines par le canal lymphatique . Un trouble de la pompe à sodium avec oedème cellulaire est la conséquence de l'hypoxie liée au choc . L'oedème, la diminution de la perfusion tissulaire, la compression, peuvent engendrer une hypoxie tissulaire avec aggravation des lésions cutanées locales. 

La brûlure s'accompagne souvent de traumatismes associés (notamment d'une inhalation de fumées) qui génèrent une réaction inflammatoire synergique à celle de la destruction cutanée et peuvent précipiter un brûlé, même de petite surface, vers l'état de brûlé sévère. Il en est de même d'une infection précoce.



Prise en charge initiale, ramassage et transfert 

Lors de la prise en charge initiale, le médecin est rarement dans les conditions de propreté et de confort qui lui permettent d'examiner correctement une brûlure. Il doit cependant décider rapidement de la gravité de la lésion et de la nécessité d'hospitaliser le patient en même temps qu'il débute les premiers gestes thérapeutiques. 
L'étalon surface du patient est la face palmaire de sa main, qui représente grossièrement 1 % de la surface corporelle et qui permet de mesurer les brûlures de petite surface. Doivent être amenés aux urgences pour, au minimum, subir des examens complémentaires : 
• les brûlés dépassant 5 paumes chez l'enfant ou la personne âgée et 10 paumes chez l'adulte ;
• les lésions de la face, des mains ou du périnée ;
• les brûlures dans un contexte de polytraumatisme, d'incendie avec risque d'inhalation de fumées ;
• les brûlures électriques. Les vêtements non adhérents doivent être enlevés, surtout ceux qui, saturés de liquides chauds, réalisent un effet cataplasme. 
Le refroidissement des lésions doit être immédiat car il n'a d'intérêt que dans le premier quart d'heure. Il s'agit de limiter la diffusion de la chaleur dans les tissus [19] et, éventuellement, l'oedème . Cela doit être fait à l'eau froide (de 15 à 20 °C) ou à l'aide de couverture d'hydrogel, mais jamais avec de la glace; l'arrosage ne doit pas excéder 5 minutes. Chez le malade inconscient, choqué ou lors de températures extérieures basses, ce refroidissement doit être évité. 
Tout brûlé grave doit être perfusé. Il est impossible sur le terrain d'évaluer avec précision les brûlures et de calculer les besoins ; aussi préférons-nous une règle basée sur le seul poids du patient : 20 ml/kg de Ringer lactate® pour la première heure (les quantités perfusées étant ensuite déduites des besoins calculés). La précocité de cette réanimation engage le pronostic ultérieur des brûlures graves . La voie veineuse utilisée doit donc être périphérique, de bon calibre et mise hors ou en zone brûlée. 
Cette voie veineuse permet l'analgésie du patient par de la morphine administrée en bolus de 2 mg chez l'adulte, réitérée jusqu'à l'obtention d'une analgésie de bonne qualité tout en maintenant un rythme respiratoire au-dessus de dix par minute. Une bonne analgésie est, le plus souvent, obtenue pour une dose voisine de 0,1 mg/kg. L'administration intramusculaire ou sous-cutanée est plus aléatoire dans ses effets et doit être réalisée à distance de la brûlure. En l'absence de morphine, le Nubain® peut être utilisé avec les mêmes effets secondaires et les mêmes précautions d'emploi. L'utilisation de la kétamine par voie rectale ou intramusculaire (8 mg/kg) permet, chez l'enfant, une analgésie suffisante à sa mise en condition. Les antalgiques mineurs (paracétamol) ou les mélanges équimolaires d'oxygène et de protoxyde d'azote sont des adjuvants qui permettent de diminuer les doses de morphiniques administrées. 
Si l'oxygénothérapie ne se discute pas chez un brûlé grave, l'intubation doit être réservée aux brûlés inconscients, présentant une détresse respiratoire, victimes de lésions très profondes de la face et du cou. 
L'administration d'hydroxocobalamine (Cyanokit®), antidote de l'acide cyanhydrique, est réservée à ce stade aux malades inconscients, présentant une instabilité hémodynamique, des troubles du rythme ou en arrêt cardiaque dans un contexte d'incendie en espace clos. Avant l'administration de 5 g (70 mg/kg chez l'enfant), des prélèvements auront été réalisés pour permettre les dosages toxicologiques (Co, Cn). Le premier des antidotes de l'intoxication par les fumées reste l'oxygène. 
La durée et la qualité du transport peuvent modifier cette prise en charge. La décision d'intubation, en particulier, est prise aisément lors de la présence d'une inhalation de fumées patentes et de brûlures supérieures à 50 % de la surface corporelle, dès lors qu'il y a transport aérien ou de longue durée. De même, la mise en place d'une sonde gastrique s'impose lors de toute montée en altitude et la mise en place d'une sonde urinaire, systématique pour toute lésion du périnée, permet ici de surveiller l'efficacité du remplissage pendant le transport. 



À l'hôpital 

Plus souvent que le centre spécialisé, c'est l'hôpital général qui reçoit en première intention le brûlé. Simple relais ou lieu d'hospitalisation, il importe que les lésions y soient évaluées de façon complète et le traitement mis en place. Le local dévolu à la réception du brûlé doit être propre et chaud. Le personnel doit rester constamment conscient du risque infectieux particulier que pose ce type de malade.



Évaluation de la gravité 
Celle des brûlures 
Surface 
Evaluée grossièrement à partir de la règle des 9, elle doit être précisée, en fonction de l'âge, en dessinant les brûlures sur un schéma et en utilisant les tables de Lund et Browder (Figure 2).


Malgré tout, cette évaluation demeure approximative. 

Profondeur 
La détermination de la profondeur demande une grande habitude clinique. 
Les brûlures superficielles ou du deuxième degré superficiel (Figure 3)


se caractérisent par des phlyctènes importantes dont la paroi est épaisse, contenant un liquide voisin du plasma qui coagule. L'ablation de cette phlyctène laisse place à un socle suintant, extrêmement douloureux. Les téguments restent souples, les poils sont adhérents, le derme change de couleur à la pression. La cicatrisation est acquise en 15 jours ; les séquelles se limitent à une dyschromie. 

Les brûlures profondes ou du troisième degré s'opposent en tout point (Figure 4).


De couleur variable en fonction de la cause, elles sont sèches et indolores. Il existe une fine pellicule d'épiderme qui se détache du derme sans phlyctène ; les téguments sont froids et ont perdu leur souplesse ; les poils n'adhèrent pas et il n'y a aucune modification de couleur à la pression. La cicatrisation ne peut se faire que par les bords : elles nécessitent donc des greffes. 

Beaucoup de brûlures, notamment par liquides chauds (Figure 5),


ne peuvent se classer ni dans l'une ni dans l'autre de ces catégories. Ces brûlures du deuxième degré profond, encore appelées intermédiaires, doivent être surveillées pendant 10 à 15 jours, délai au-delà duquel une greffe est envisagée s'il n'y a pas de cicatrisation. 
L'érythème solaire (ou premier degré) (Figure 6)
est une destruction de la couche cornée qui n'entraîne pas de choc. L'interrogatoire du patient doit s'attacher à retrouver la prise de drogues photosensibilisantes chez le patient qui consulte pour des lésions cutanées après exposition prolongée au soleil. Si tel est le cas, une décision d'hospitalisation s'impose, car ces lésions évoluent rapidement vers un décollement épidermique majeur. 
Les lésions de dermabrasion par frottement, notamment sur le sol, sont des équivalents de brûlures sans réaction inflammatoire immédiate.



Localisation des brûlures 
Elle doit être soigneusement notée. 
Les brûlures de la face se traduisent par un oedème souvent monstrueux qui empêche la reconnaissance du patient. Dès lors que cet oedème est important et que la brûlure atteint le cou, il y a danger d'obstruction des voies aériennes. Devant toute lésion, même minime, il faut savoir rechercher, par l'analyse des circonstances de l'accident, la possibilité d'une inhalation de fumées. Lors de lésions d'origine thermique, il n'y a pas d'atteinte du globe oculaire : celui-ci est protégé par la fermeture réflexe des yeux (en l'absence de perte de connaissance). 
Les brûlures du périnée présentent un risque infectieux qu'il faut prendre en compte. L'oedème des organes génitaux gêne le sondage urinaire ; il faut savoir le réaliser tôt. 
Les mains se caractérisent par l'absence de tissu graisseux et la présence directement sous la peau (et donc sous la brûlure) de l'appareil ostéotendineux. Une intervention précoce peut donc être décidée ; il faut adresser ces brûlures à un centre spécialisé dès qu'elles paraissent profondes. 
Les brûlures circulaires et profondes des membres (et parfois du cou et du thorax) créent, par perte d'élasticité de la peau, un effet garrot qu'il faut rechercher. 
Les lésions profondes de la paroi thoracique en altèrent la compliance, et peuvent modifier les échanges pulmonaires et augmenter les besoins de remplissage vasculaire . 



Lésions associées
Avant l'hospitalisation en centre spécialisé, elles doivent être systématiquement recherchées si le contexte de survenue est évocateur. 
En cas d'incendie ou d'émission de fumées en espace clos, la recherche d'une inhalation de fumée s'impose. Le diagnostic en est difficile, car le tableau est pauvre dans les premières heures ; le pronostic est d'autant plus grave que la décompensation survient plus précocement. La raucité de la voix, la toux qui ramène des suies, l'auscultation qui fait entendre un mélange de ronchi et de sibilants, sont bien souvent absentes ; la détresse respiratoire sous forme d'oedème aigu pulmonaire précoce est exceptionnelle mais très grave. La radiographie du thorax est le plus souvent normale, de même que la gazométrie sanguine où l'on s'attache à retrouver une hypoxie et une acidose lactique symptomatique d'intoxication au monoxyde de carbone (à mesurer dans l'air expiré puis dans le sang) ou aux cyanures. C'est la bronchofibroscopie qui apporte la certitude diagnostique en objectivant les lésions bronchiques et extrabronchiques ; elle permet également d'éliminer les suies obstructives. 
En cas d'accident de véhicule ou de défenestration, le bilan traumatique doit être mené avec rigueur en sachant que : 
• un brûlé est toujours conscient en dehors d'un traumatisme crânien ou d'une intoxication ; une tomodensitométrie s'impose donc en cas de troubles de conscience ;
• il peut y avoir une autre cause d'hypovolémie que la brûlure ; des besoins anormaux en remplissage et un hématocrite inférieur à 35 % (le brûlé est hémoconcentré) doivent faire rechercher un saignement interne thoracique ou abdominal (scanner, échographie) ;
• les déformations et les douleurs peuvent être masquées par l'oedème et la brûlure ; des clichés de squelette doivent donc être réalisés comme pour tout polytraumatisé ; la présence d'un hématome périfracturaire enfermé dans une brûlure circulaire met très vite en péril la vascularisation du membre atteint. 
En cas d'explosion, outre le risque traumatique évoqué ci-dessus, le médecin doit rechercher des lésions liées à l'onde de choc (ou blast). Elles atteignent plus facilement les organes creux et, au premier chef, le tympan. Cependant, plus que l'observation d'une perforation ou d'une hémorragie tympanique qui peuvent être absentes, c'est la connaissance des dégâts provoqués et la situation de la victime par rapport à l'explosion qui doivent faire soupçonner les lésions pulmonaires et susciter une surveillance « armée ». Les lésions de criblage nécessitent un parage systématique et entraînent les lésions les plus variées. 
L'association à la brûlure d'une lésion acquise nécessite le transfert en centre spécialisé. Les lésions respiratoires et crâniennes, en particulier, sont considérées comme des extrêmes urgences. 



Scores de gravité 
La mortalité des brûlures est influencée par trois facteurs : la surface brûlée (supérieure à 40 %), l'âge du patient (supérieur à 60 ans) et la présence de lésions d'inhalation. La mortalité serait de 3 % lorsque l'un de ces facteurs est présent, de 33 % lorsqu'ils sont au nombre de deux et de 90 % lorsque les trois sont associés . 
L'addition de la surface totale brûlée (STB) à trois fois la surface brûlée profonde (STBP) permet le calcul du score de gravité UBS=STB+(3×STBP). Une brûlure est grave dès 50 UBS ; elle est très grave au-dessus de 150 UBS [29]. L'addition de l'âge et de la surface brûlée constitue le score de Baux, la mortalité est importante dès qu'il dépasse 100 ; ce score est surtout significatif pour le pronostic des brûlures chez les personnes âgées. 

Traitement 
Brûlures 
Traitement général 
Oxygénothérapie, intubation, trachéotomie. 

L'oxygénothérapie est de règle chez un malade potentiellement choqué. La décision d'intubation ou de trachéotomie doit être prise : 

• devant un danger obstructif : lésions profondes de la face et du cou, oedème très important, modification de la voix ; l'installation du patient en position demi-assise, les aérosols vasoconstricteurs et la kinésithérapie intensive permettent parfois de limiter ce danger ;
• devant toute inhalation de fumée patente associée à des brûlures cutanées étendues et siégeant au pôle supérieur de l'individu rendant illusoire toute kinésithérapie ou séance de ventilation en pression expiratoire positive au masque ;
• lors de brûlures très sévères couvrant plus de 50 % du corps justifiant sédation et anesthésies répétées qui nécessitent une ventilation artificielle. 
Correction de l'hypovolémie 
Aspect qualitatif. L'hyperperméabilité initiale laisse fuir tous les colloïdes dans le secteur interstitiel : dans les premières heures, leur administration est donc inutile et pourrait se traduire par une augmentation retardée de l'eau pulmonaire. L'apport de sodium est en revanche indispensable à la dose de 0,5 mmol/kg/%. Le cristalloïde le plus proche du plasma par sa composition électrolytique, le Ringer lactate®, est donc le plus logiquement employé . Légèrement hypotonique, il doit être remplacé par du sérum physiologique lors d'un traumatisme crânien associé . 
L'introduction des colloïdes est nécessaire dans les lésions les plus graves (supérieures à 30 %), où les cristalloïdes seuls ne peuvent restituer une volémie efficace , afin de limiter les apports liquidiens, la fuite dans les tissus non brûlés et un oedème délétère. L'albumine est employée à partir de la huitième heure afin de ne pas laisser l'albuminémie descendre au-dessous de 20 g/l, la protidémie à 35 g/l ou la pression colloïdo-osmotique à 12 mmHg. Les hydroxyéthylamidons ne peuvent être employés à des doses supérieures à 50 ml/kg ; ils agissent sur une coagulation déjà modifiée par la brûlure et peuvent gêner les gestes chirurgicaux précoces. Les dextrans ont une répercussion sur l'hémostase primaire et les gélatines une viscosité élevée gênante chez un malade très hémoconcentré. Les colloïdes sont accusés d'être délétères sur le rein. Les indications du plasma frais congelé sont limitées aux patients qui présentent un taux de prothrombine inférieur à 30 % et qui saignent ou que l'on doit opérer rapidement. 
Aspect quantitatif. On peut donc proposer le protocole suivant
• pour les 8 premières heures : le débit de perfusion est calculé pour apporter 2 ml/kg/% de surface brûlée de Ringer lactate® (sérum salé isotonique en cas de traumatisme crânien) ;
• à la huitième heure, le débit est diminué ; la prescription de la huitième à la vingt-quatrième heure est de 1 ml/kg/% ; si la brûlure est inférieure à 30 %, sans lésion associée, cet apport est composé de Ringer lactate® ; si la brûlure est grave, la protidémie basse, l'albumine isotonique est utilisée en association avec du Ringer lactate® (0,5 ml/kg/% de chaque) ;• de la vingt-quatrième à la quarante-huitième heure, la quantité prévisible de liquides perfusés est celle réellement administrée de 8 à 24 heures ; l'albumine est prescrite lorsque la protidémie est inférieure à 35 g/l. 
Chez les enfants de moins de 20 kg, les équipes de pédiatrie préfèrent utiliser la formule de Carjaval basée sur la surface corporelle. Les besoins des premières 24 heures sont de 5 000 ml/m2 de surface brûlée auxquels on rajoute les besoins de base, soit 2 000 ml/m2 de surface corporelle totale ; la moitié des apports calculés doit être apportée dans les premières 8 heures. 
Surveillance. C'est le seul guide objectif des besoins du malade. Les moyens habituels (fréquence cardiaque, pression artérielle, oxymétrie pulsée) sont d'obtention difficile chez les patients les plus graves, couverts de pansements. La mise en place d'un cathéter artériel est nécessaire dans les brûlures très étendues associées à des problèmes pulmonaires.



Points essentiels 
Objectifs de la réanimation
• Conscience normale, analgésie et sensation de confort.
• Chaleur des extrémités.
• Fréquence cardiaque de 60 à 120 battements par minute.
• Pression artérielle moyenne à 70 mmHg.• Débit urinaire :
○ urines claires : 0,5 ml/kg/h ;
○ urines foncées (sang, myoglobine) : 1 ml/kg/h.
• Biologie :
○ hématocrite<50 % ;
○ base déficit<3 ;
○ lactatémie artérielle<4 mmol/l.



Le paramètre le plus abordable et le plus souvent suffisant est la mesure de la diurèse (Figure 7) :


celle-ci doit être maintenue à 0,5 ml/kg/h chez l'adulte et 1 ml/kg/h chez l'enfant. La qualité de cette diurèse doit cependant être analysée : elle n'est un reflet de la volémie que lorsqu'elle ne contient pas de sucre, que son osmolarité se situe entre 600 et 900 mOsm/l, que l'alcoolémie du patient est inférieure à 2 g/l et que l'on n'a pas employé de solutés hyperosmolaires. Lorsque les urines sont foncées, contenant myoglobine ou hémoglobine, une diurèse de 2 ml/kg/h peut permettre d'éviter une insuffisance rénale. 

Le plus souvent, ce type de surveillance suffit, il n'existe pas de signes de souffrance tissulaire et les chiffres d'hématocrite, de base déficit et de lactatémie artérielle s'améliorent progressivement. Il n'y a alors pas lieu de corriger une hypovolémie (hypovolémie permissive) qui est manifeste quelle que soit sa méthode d'évaluation. 
Si les besoins de remplissage deviennent supérieurs à deux fois les chiffres du remplissage théorique, il faut alors en analyser la cause et essayer d'optimiser l'état hémodynamique



Point essentiel 
Causes de besoins en remplissage augmentés
• Saignement (hématocrite)
• Ventilation artificielle
• Sédation excessive
• Réaction inflammatoire majeure
○ Brûlures très profondes
○ Inhalation de fumées
○ Infection précoce



La mesure de la pression veineuse centrale (PVC) permet de distinguer l'hypovolémie persistante (PVC inférieure ou égale à 2 mmHg) de l'apparition d'une insuffisance myocardique (PVC supérieure à 8 mmHg) qui augmente avec le remplissage. Cette éventualité est rencontrée lors de brûlures supérieures à 40 %. Il paraît donc licite de poser d'emblée un cathéter central à ces patients. 
Dans quelques cas, l'hypovolémie persiste malgré des apports plus de deux fois supérieurs aux quantités théoriques. Les liquides sont stockés dans un oedème généralisé qui devient monstrueux, il apparaît un oedème pulmonaire objectivé par une chute du rapport pression artérielle en oxygène (PaO2) / concentration de l'oxygène dans l'air inspiré (FiO2) à un chiffre inférieur à 300. Une exploration hémodynamique par cathéter de Swan-Ganz s'impose alors, objectivant des pressions de remplissage basses et des résistances vasculaires effondrées ; le débit cardiaque est insuffisant pour faire face à la chute des résistances. L'introduction de drogues vasoactives, adrénaline ou noradrénaline plus dobutamine, se discute alors. La pratique d'échanges plasmatiques (plasmaphérèse ou hémofiltration) peut en diminuer les besoins. 
À la trente-sixième ou quarante-huitième heure, le drainage lymphatique devient enfin supérieur à la fuite liquidienne. Il permet un retour progressif, sur plusieurs jours, au poids de départ. Chez les malades graves sous ventilation artificielle et soumis à une analgésie, il existe une situation d'antidiurèse  qui amène à employer des diurétiques. 
Le meilleur remplissage est celui qui permet de réanimer le patient sans souffrance tissulaire au prix du moindre oedème. En effet, celui-ci est délétère car il entraîne une diminution de l'oxygénation tissulaire, une plus grande fréquence de la pratique d'intubation, d'incisions de décharge et de survenue d'un syndrome compartimental abdominal .
Analgésie, anesthésie.

Il existe deux types de douleur chez le brûlé : une douleur provoquée par les pansements, les mobilisations, la kinésithérapie, qui survient sur une douleur de fond permanente. 

La douleur de fond est traitée par les morphiniques. Le chlorhydrate de morphine, qui a un effet sédatif autant qu'analgésique, est le plus utile dans cette indication. 



Point fort 
Analgésie morphinique
• Administrée à la seringue électrique, la dose horaire est de 2 mg/h chez l'adulte après titration.
• À la pompe d'autoanalgésie contrôlée, la dose de départ est de 2 mg, puis les injections à la demande de 1 mg avec une période réfractaire de 7 minutes.
• Per os, la morphine à libération prolongée à la dose initiale de 2 mg/kg est administrée en deux prises quotidiennes.



Bien entendu, ces doses sont modifiées en fonction de la douleur résiduelle évaluée par échelle verbale ou visuelle analogique. 
Le paracétamol et le tramadol n'ont pas la même efficacité et sont employés seuls dans les brûlures mineures ou en association avec la morphine dans les atteintes plus graves afin d'en diminuer les besoins. 
Les gestes douloureux peuvent nécessiter une anesthésie. Il y a lieu d'éviter, dans les premières heures d'évolution, les anesthésiques vasoplégiants comme le propofol. Les produits utilisables sont le midazolam, la kétamine, l'étomidate ou le gamma hydroxybutyrate de sodium. Ce dernier en particulier a un effet favorable sur le plan hémodynamique, apporte du sel, maintient une ventilation spontanée, favorise le transit digestif et prévient l'hyperkaliémie, ce qui en fait un narcotique de choix chez le brûlé très grave. La kétamine peut être administrée par voie intramusculaire et, de façon plus aléatoire, par voie rectale à la dose de 7 à 10 mg/kg, ce qui permet de mettre en place une voie veineuse chez l'agité ; ceci ne dispense des précautions propres à toute anesthésie. Le réveil des brûlés ainsi endormis est toujours agité. 
L'administration d'un curare dépolarisant est autorisée chez le brûlé pendant les premières heures d'évolution et la pratique d'une crashinduction par étomidate succinylcholine est possible.



Prévention des lésions digestives de stress. 
L'administration d'antiacides gastriques n'est pas utile chez un patient bien réanimé ; les hémorragies digestives à ce stade sont devenues exceptionnelles. Les antisécrétoires sont donc réservés aux patients ayant des antécédents ulcéreux.



Nutrition
Dès la mise en place dans leur lit de réanimation, dans les toutes premières heures, une sonde gastrique permet l'alimentation entérale à base d'un soluté à 0,5 cal/ml à un débit de 25 ml/h. Cela permet d'éviter une diminution très rapide de la masse fonctionnelle de l'intestin. Le contrôle des résidus gastriques se fait toutes les 4 heures ; en cas d'intolérance, l'administration d'accélérateurs du transit est un excellent appoint.



Autres médications. 

Aucune antibiothérapie ne se justifie à ce stade de la brûlure. Seules les lésions du périnée, les lésions souillées ou très profondes ayant nécessité escarrotomies ou perfusion sont traitées par de la pénicilline G, éventuellement associée à de l'ornidazole ou du métronidazole en cas de risque fécal. 

Certaines équipes utilisent une héparinothérapie intraveineuse dès les premières heures de la brûlure. Il s'agit alors de lutter contre un phénomène microthrombotique. L'administration doit être prudente (50 UI/kg/24 heures) sous strict contrôle du laboratoire. La prévention du risque thromboembolique par héparine de bas poids moléculaire sous-cutanée ne se justifie qu'à partir du quatrième jour d'évolution. 
La prévention du tétanos doit être systématique. 



Traitement local 
Il obéit toujours à la même séquence : 
• lavage des brûlures avec un savon antiseptique (Hibiscrub®, Bétadine®) ; rasage des zones brûlées et adjacentes à la brûlure ; mise à plat des phlyctènes ;
• rinçage à l'eau du robinet ou faiblement javellisée ;
• pansement : si le patient est évacué vers un autre centre, le pansement doit être neutre, ne pas transformer la brûlure (ne pas utiliser de pommade), pansement gras ne contenant pas de camphre, pansements non adhérents ou simples champs chirurgicaux ; si le patient reste hospitalisé dans le même service, les pansements à base de sulfadiazine d'argent permettent une bonne prévention de l'infection et un excellent confort du patient. 
La présence de brûlures circulaires profondes des membres impose des escarrotomies (Figure 8)


Ce geste consiste à inciser la peau brûlée dans l'axe du membre ; il ne se justifie qu'au bout de quelques heures (de 4 à 6 heures) lorsque l'oedème s'est développé. Le membre est alors tendu, l'impotence fonctionnelle et la douleur à la pression de règle. Des pressions dans les loges musculaires supérieures à 35 mmHg constituent une indication formelle d'escarrotomie. Mais, le plus souvent, c'est l'aspect clinique qui guide la décision. 

Toute brûlure qui ne présente pas de signes de cicatrisation au quinzième jour doit être présentée à une consultation spécialisée. Une décision de greffe peut être prise si les lésions sont d'emblée profondes (Figure 9).




Lésions associées
Inhalation de fumée
Les lésions d'inhalation de fumées nécessitent une adaptation de traitement. 
Sur le plan hémodynamique, elles aggravent le choc, augmentant de 30 à 50 % les besoins en remplissage . Elles sont aggravées par l'hyperhydratation autant que par l'insuffisance d'apport . La surveillance de remplissage doit donc être particulièrement précise et être guidée au minimum par la PVC, parfois par la mise en place de la mesure du contour de l'onde artérielle, par un cathéter de type Swan-Ganz ou par échocardiographie transoesophagienne. 
Sur le plan respiratoire, il existe un oedème pulmonaire, un trouble de la compliance pulmonaire mais aussi pariétale par brûlures cutanées, et une obstruction bronchique par oedème et par débris fibrineux. Il en résulte une grande inhomogénéité ventilatoire corrigée par l'introduction d'une pression expiratoire positive. Le mode de ventilation est ensuite adapté au patient. La pratique d'escarrotomies du thorax en cas de brûlures circulaires du tronc permet d'augmenter la compliance pariétale qui reste néanmoins toujours altérée. 
Le risque infectieux est important en cas de brûlures bronchiques. Il faut le prévenir par des toilettes répétées fibroscopiques des bronches et par la détection de toute contamination bactérienne. 
L'intoxication oxycarbonée doit être traitée par oxygénation à haute concentration. L'état du patient permet rarement son transport et sa surveillance dans un caisson d'oxygène hyperbare. Il est donc ventilé à FiO2 égale à 1 pendant 6 heures puis à 0,6 jusqu'à disparition de l'oxycarbonémie. 
La présence d'une acidose lactique supérieure à 10 mmol/l impose le traitement de l'intoxication cyanhydrique par de l'hydroxocobalamine avant réception des dosages toxicologiques qui sont rarement réalisés en urgence. 
Lésions traumatiques 
La prise en charge des autres lésions traumatiques est peu modifiée par la brûlure . 
Si nécessaire et pendant une douzaine d'heures, la voie d'abord chirurgicale peut passer sans dommage à travers la brûlure. Passé ce délai, la séquence excision de la brûlure, abord chirurgical de la lésion, fermeture et greffes cutanées permet de solutionner la plupart des cas. Toutes les fractures doivent être fixées afin de permettre un nursing convenable du brûlé. 
La réanimation de ce polytraumatisé doit tenir compte de toutes les lésions (saignement et plasmorragie de la brûlure). 



Brûlures particulières 
Brûlures électriques




On parle de brûlures électriques (ou brûlures électrothermiques) lorsque la victime a présenté un trajet intracorporel de tout ou partie du courant auquel il a été exposé. Les points d'entrée et de sortie ne sont que la partie émergée de l'iceberg ; il existe un trajet intracorporel qui fait toute la gravité des lésions . 
Les brûlures liées à l'étincelle (brûlures parflash) sont des brûlures thermiques ; elles peuvent être très étendues, d'autant plus considérables qu'il y a eu inflammation des vêtements. L'arc électrique est un mode de propagation externe du courant de la source à la victime ou d'un promontoire osseux à un autre qui s'accompagne de lésions thermiques de la peau mais aussi d'un trajet interne plus ou moins important. Les multiples petites traces d'étincelles cutanées constituent les marques électriques de Jellineck, caractéristiques des brûlures électriques. 



Effets du courant électrique sur le corps 
Les effets dépolarisants de la paroi cellulaire sont la cause de perte de connaissance, d'arrêt cardiaque par fibrillation, de troubles du rythme parfois retardés, d'arrêt respiratoire, de spasme laryngé, de contraction musculaire avec tétanisation, de crises convulsives. L'analyse du trajet du courant est importante : les trajets main à main ou membre supérieur à membre inférieur controlatéral passent ainsi par le médiastin. 
Les pertes de connaissance, causes de chutes, et la tétanisation musculaire entraînent des lésions musculosquelettiques qu'il faut savoir rechercher. 
La traversée des tissus par le courant entraîne une libération de chaleur selon la loi de Joule. Il existe entre l'entrée du courant et sa sortie un trajet brûlé beaucoup plus important que les simples lésions visibles. Le courant suit préférentiellement les zones de faible résistivité (vaisseaux et nerfs) qu'il brûle de façon centrifuge. Il existe donc une thrombose artérielle et veineuse qui rajoute un phénomène d'ischémie au phénomène d'électroporation de la paroi cellulaire. Les lésions sont donc évolutives pendant plusieurs jours. Cette ischémie, la tétanisation, la brûlure musculaire, créent un myooedème, le muscle comprimé dans ses loges se nécrose en libérant de la myoglobine. Le choc lié à la brûlure et à la rhabdomyolyse, et la libération de myoglobine néphrotoxique, concourent à la création d'une insuffisance rénale à la fois prérénale, rénale et postrénale. L'augmentation des créatine phosphokinases et des aldolases est le témoin de l'importance de l'agression tissulaire ; celle de la topononine Ic reflète celle du myocarde. 
Une kératite est habituelle, liée à l'arc électrique (« coup d'arc »). 
Les brûlures liées à des courants de bas voltage (< 1 000 V) tiennent leur gravité des effets dépolarisants de l'électricité (arrêt cardiaque et respiratoire) ; les lésions de brûlures sont limitées. Les brûlures de haut voltage (> 1 000 V) génèrent des lésions de destruction cellulaire qui les rapprochent des lésions de crush, avec atteinte des tissus profonds ; les conséquences fonctionnelles sont considérables. 
Les brûlures électriques se compliquent de lésions neurologiques ou oculaires (cataracte...) d'apparition précoce ou retardée. L'examen initial est particulièrement important dans l'attribution a posteriori du préjudice lorsqu'il s'agit d'un accident du travail.



Traitement
Traitement général 
Il découle de ce qui a été décrit (cf. supra). En cas d'électrisation par courant de bas voltage, après mise en place des mesures de sauvetage, le malade doit être placé sous surveillance, les électrocardiogrammes doivent être répétés, l'état du malade évalué et le trajet du courant analysé avant de laisser éventuellement la victime rentrer chez elle. 
En cas de lésions par courant de haut voltage, une perfusion s'impose rapidement, dont le débit ne peut être calculé sur la seule surface brûlée visible. Un débit horaire de 30 à 40 ml/kg est souhaitable, constitué pour moitié de Ringer lactate® et pour moitié de sérum bicarbonaté à 14 ‰. Le sondage urinaire doit être entrepris le plus rapidement possible, qui ramène des urines contenant des dépôts noirâtres. L'objectif ultérieur de la réanimation est d'atteindre une diurèse supérieure à 2 ml/kg/h, dont le pH est supérieur à 7. À cette valeur de pH, en effet, la myoglobine solubilise et les urines deviennent rouges et sans dépôts. Les lésions visibles ne sont que partie des dégâts, il n'existe pas de formule de remplissage adéquat et il n'est pas rare d'atteindre de 8 à 10 ml/kg/% . L'administration d'héparine est logique mais n'a pas fait la preuve de son utilité ; elle n'est instituée que sous contrôle étroit du laboratoire. 



Brûlures chimiques




Il est difficile de faire la liste exhaustive des produits  qui peuvent donner des lésions cutanées. La conduite à tenir répond néanmoins toujours aux mêmes impératifs : soustraire le sujet à la source contaminante ; enlever le toxique résiduel, éventuellement le neutraliser ; en traiter les conséquences locales et parfois générales. Ces brûlures surviennent le plus souvent lors d'un accident de travail, plus rarement lors d'un accident domestique ou d'une agression. 
La classification des produits chimiques peut se faire à partir de leur mode d'action (réduction, oxydation, action corrosive, poisons protoplasmiques, action dessiccante ou vésicante) ou par leur classe chimique (acides, bases, agents anorganiques ou composés organiques). Ils aboutissent tous à la destruction des structures protéiques et pour certains à la saponification des graisses, à la destruction des parois cellulaires, à la chélation du calcium, à une action sur les chaînes d'acide désoxyribonucléique et à la libération des protéases. Ils peuvent provoquer des réactions exothermiques et peuvent avoir une toxicité générale, neurologique, cardiaque ou hématologique.



Conduite à tenir 
L'ablation rapide du produit s'impose par le déshabillage du patient. Ce déshabillage s'accompagne d'un lavage effectué à grande eau (si possible douches à haute densité) et qui dure longtemps (de 15 à 20 minutes). Ce doit être un réflexe : peu de produits d'usage courant ne s'éliminent pas à l'eau (seul le fréon utilisé dans la climatisation s'élimine à l'huile). 
L'usage d'absorbants, talc, gant poudreur, est nécessaire pour les toxiques à absorption rapide dont le lavage facilite la pénétration et le rejet peut être dangereux pour l'environnement. Les chélateurs (polyéthylène glycol dans le cas du phénol) sont d'usage moins courant et exigent de connaître le toxique. L'utilisation de solutions faites d'une molécule « cage » à propriétés amphotères (Diphoterine®) reste à valider, de même que l'éventuelle toxicité du produit . 
La neutralisation ne peut survenir que dans un second temps, lorsque le toxique est connu. Le problème du dosage du produit neutralisant est difficile. 
La toxicité générale du produit peut être connue dans un troisième temps, après appel à un centre antipoison. 
Bien des lésions chimiques apparaissent tardivement après l'exposition, posant alors le seul problème de leur traitement local ; c'est le cas des brûlures des genoux par contact prolongé avec du ciment. 
Les lésions oculaires, fréquentes lors des brûlures chimiques, doivent subir le même lavage initial et être confiées d'urgence à un ophtalmologiste. 



Cas particuliers 
Les brûlures par le phosphore, rencontrées en zone de conflits, sont à la fois thermique (le phosphore brûle dès qu'il est en contact avec l'oxygène) et chimiques. L'utilisation de pansements humidifiés en permanence avec du sérum physiologique ou mieux celle de gels d'eau permet d'arrêter la combustion du produit. La transformation du phosphore en sel inerte est obtenue par l'utilisation de solutions de sulfate de cuivre à une concentration qui ne doit pas dépasser 1 % sous peine d'hémolyse. L'administration intraveineuse de calcium permet d'éviter les troubles du rythme cardiaque par hypocalcémie. 
Les brûlures par acide fluorhydrique se rencontrent dans l'industrie du verre, de nettoyage des métaux et dans l'industrie électronique. L'usage en est strictement réglementé et les utilisateurs a priori protégés. L'acide fluorhydrique est en effet responsable de lésions locales térébrantes, retardées et très douloureuses, et d'arrêts cardiovasculaires lors d'intoxication par des concentrations élevées avec émission et inhalation de vapeurs. L'administration locale de calcium en gel, locorégionale par voie sous-cutanée, et intra-artérielle, permet de diminuer les lésions locales tandis que l'administration parentérale de calcium permet quelquefois d'éviter l'arrêt cardiaque. Le pronostic de brûlures est redoutable et l'hospitalisation s'impose même devant des lésions minimes. 



Brûlures radiologiques 
Elles doivent être connues des urgentistes car les lésions cutanées n'apparaissent que tardivement et le tableau est souvent dominé par des lésions associées : irradiation, traumatismes mécaniques et thermiques. Les lésions cutanées isolées sont de diagnostic difficile lorsque l'anamnèse est mal connue : elles sont le fait de contamination externe par des émetteurs bêta, d'irradiation localisée par des sources médicales ou industrielles, d'exposition à un accélérateur de particules. 
Après une phase d'érythème et de prurit, la latence est de règle. C'est le délai nécessaire à la traduction de la destruction de la membrane basale épidermique. Par la suite, dans un délai de quelques semaines, apparaissent oedème et ankylose, puis phlyctènes et nécrose. Les lésions sont d'autant plus profondes que l'énergie du rayonnement est plus importante. L'évolution de ces lésions est torpide et longue, faite d'alternances de cicatrisation et de lyse cutanée ; la symptomatologie est très douloureuse. Dans un second temps apparaissent des lésions de nécrose, ulcérations noirâtres liées à une vascularite. 



Traitement 

La nécessité de fermer les lésions avant l'aplasie liée à une éventuelle irradiation peut amener à utiliser des méthodes de recouvrement à type d'allogreffes cutanées ou de culture d'épiderme ou de peau .

Il consiste en la compensation des pertes hydroélectrolytiques cutanées, le maintien d'un état nutritionnel correct, la lutte contre la douleur, la prévention et le traitement de l'infection. Le traitement local est le traitement habituel des brûlures cutanées. Les greffes dermoépidermiques sont le plus souvent nécessaires ; le niveau d'excision doit tenir compte d'une atteinte profonde du derme malgré un aspect faussement superficiel. Les prélèvements de peau doivent absolument être réalisés en zone non irradiée.

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